À tous vouloir jouer leur carte, les Espoirs bretons sont passés à côté

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

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Ce sera un jour à oublier pour la Bretagne. Le Championnat de France Espoirs a viré au fiasco, sur leurs terres à Plédran. L’agacement était général, tant chez les coureurs, que l’encadrement et aussi le public, qui attendait de voir un maillot noir disparaitre sous le maillot tricolore, pour la première fois depuis 1999 et le succès de Freddy Ravaleu. En plus, avec 18 coureurs au départ, tous les ingrédients étaient réunis pour au moins faire une course de gala, avec une sélection impressionnante sur le papier. Mais les Bretons ont couru à l’envers et rien ne s’est passé comme prévu. "C’est une grosse déception, individuellement et collectivement. On était venu pour gagner et on est passé à côté. Le fait d’être quatre ou cinq à pouvoir gagner était un avantage et un inconvénient. On peut jouer sur le nombre et tout le monde veut gagner. C’est compliqué", raconte Nolann Mahoudo.

Pourtant, toute la journée, la Bretagne a fait la course en surnombre. Toujours représentée dans les coups, le Championnat ne commençait pas si mal. Jusqu’à l’attaque d’Axel Huens, Maximilien Juillard et Alexy Faure Prost, finalement tous les trois médaillés. "Notre première erreur est d'avoir laissé partir les trois. Je pensais rentrer juste après, il y a eu une petite cassure mais on ne s'est jamais organisé pour rentrer sur eux. Je suis très déçu, les jambes étaient là et les titres, on n'en joue pas tous les jours", regrette Brieuc Rolland, aux yeux bien humides à l’arrivée. Antoine Hue avait lui raté le bon coup dès le début. "Je pense que c'est mon erreur de la course, je n'ai pas pu ou su prendre ce groupe". Une énième accélération de Noa Isidore lui permet de filocher entre les groupes. "On était tout le temps en surnombre, c’était à la fois facile et pas facile. Il fallait collaborer et faire attention de ne pas se rouler dessus mais je ne suis pas sûr qu’on ait très bien géré le final".

« IL Y A DES TRUCS QUE JE NE COMPRENDS PAS TROP »

Les problèmes ont alors commencé. Alors que le reste du peloton explose en petits groupes. Brieuc Rolland est dans le premier contre, avec Nolann Mahoudo et Killian Verschuren. Mais derrière, la Bretagne met un gros coup de vis sur un tour pour ramener un deuxième contre. "Pour l'organisation du groupe de contre, je n'ai pas de réponse. On était quatre devant du comité, l'équipe de Bretagne ramène sur nous. Je veux bien qu'on ne court pas toute l'année dans la même équipe mais on est chez nous. Il y a des trucs que je ne comprends pas trop", lance le coureur de la Conti Groupama-FDJ. "On était l’équipe à battre et on avait du monde sur le dos, c’est normal et c’était à nous d’assumer en étant les plus nombreux. Mais quand on est une vingtaine, ne venant pas des mêmes clubs, on n'a pas tous les automatismes et on peut se rouler dessus", tempère celui qui porte les couleurs du CIC U Nantes Atlantique.

De son côté, Damien Bodard fait la course à contretemps. Régulièrement à l’attaque, il finit par donner de sa personne pour rouler dans un groupe, avec plusieurs Bretons à ses côtés. "On n’avait pas spécialement de leader, il fallait qu’on se parle. On savait que Pierre Thierry était en forme donc on aurait pu jouer sa carte. Mais le problème c’est que personne n’osait vraiment passer. On passait mais il y en a peu qui se sacrifiaient pour l’équipe. On ne court jamais ensemble, on est adversaires tout au long de l’année. Sur une course, rouler pour les autres, c’est compliqué pour certains. J’ai voulu rouler mais quand tu vois certains qui ne veulent pas passer tu te dis « pourquoi moi je roulerais et pas les autres »", regrette le coureur de Sojasun espoir-ACNC. Et pourtant, les Bretons ont communiqué. "On s’est parlé pour savoir ce qu’on faisait. On ne s’est pas forcément engueulé mais tout le monde voulait faire sa place, c’est dommage".

« JE TENAIS À FAIRE LE SPRINT PARCE QUE J’ÉTAIS DÉGOÛTÉ »

Antoine Hue aurait aimé voir certains se sacrifier aussi. "On aurait dû essayer de tous rouler et s’engager ensemble, quitte à ce que quelques-uns explosent. Mais là, on a tous voulu jouer notre carte". Cette fois, Damien Bodard va dans le sens de son coéquipier. "Il fallait réagir parce qu’on roulait mais on perdait du temps. À un moment c’est soit il fallait rouler, soit il fallait relancer un coup pour qu’on soit moins nombreux et qu’on roule vraiment. À la fin, dans le dernier tour je me suis dit autant tenter, je n’ai pas envie d’avoir de regrets à l’arrivée. J’ai tenté ma chance, je suis sorti". Et c’est finalement un tir groupé en chocolat. "En fin de compte, on ne fait rien. Damien (Bodard) fait 5e, Brieuc (Rolland) fait 7e et moi 9e. On fait une tactique Movistar. Personne n’est sur le podium. Je pense qu’au débriefing, ça va être compliqué...", imaginait Antoine Hue.

Comme la plupart de ses coéquipiers, Brieuc Rolland a lui aussi fini par jouer sa carte. Par colère avant de penser à mal. "Je tenais à faire le sprint (pour la place de 7, NDLR) parce que j'étais dégoûté. Toute la course à l'avant, je voulais me battre jusqu'à la fin parce que je trouve qu'on n'a pas bien couru, j'ai fait le sprint un peu sur les nerfs". Le sourire n’était pas vraiment de la partie à l’arrivée, sur le parking des Bretons. Certainement pas pour Antoine Hue, qui avait du mal à cacher sa déception. "Si on avait fait 1er, 9e et 10e, on aurait été content d’en avoir trois dans les dix premiers mais là, ce n’est pas très intéressant". Et c’est finalement à l’image de ce qu'a proposé le comité de Bretagne ce samedi.

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Portrait de Antoine HUE
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Portrait de Brieuc ROLLAND